Tout part d’une rencontre dans un espace caverneux composé de vêtements assemblés avec la minutie d’une couturière ne souhaitant pas que l’envers soit moins avenant que l’endroit, où filtrent, à la fois, la lumière et des voix parlant de vêtements portés. Nous sommes dans Habit(é)s au Centre d’art contemporain Tignous à Montreuil et Thierry Gilotte sourit. Ce qui suit est issu d’un entretien pour en savoir davantage sur une démarche artistique qui s’intéresse, aujourd’hui, aux vêtements après avoir été centrée sur des constructions en bois.

Le projet général est de faire image avec ce que l’artiste connait du monde. Thierry Gilotte part du multiple, de la multitude, crée de l’unité, définit une harmonie et en fait un lieu. Le vêtement et le langage – les deux matériaux de cette œuvre – possèdent la caractéristique de relier et de différencier. Alors, il les collecte, les rassemble et construit un espace.

Nous pénétrons en eux comme dans une nasse, nous circulons dedans comme dans un organe humain ou dans ces circuits du corps qui nous échappent et nous font exister. Nous sommes tout-petits, bien que les chemises et autres effets soient à l’échelle humaine ! Les vêtements sont des objets tissés qui tissent des liens entre eux, mais aussi avec les personnes, les événements, la petite et la grande histoire… En réalité, ils sont lourds de sens, et, dans la légèreté de ces étoffes suspendues, Thierry Gilotte traque leurs significations. Il procède en les ajustant les uns aux autres en étant attentif aux passages d’une couleur à l’autre. Les nuances se déclinent comme autant de touches sur une toile. Nous sommes dans la peinture : les pieds dedans ! Habit(é)s face à des oripeaux vidés de leurs occupants faisant toujours société. « Mon travail ne porte pas sur moi. Ça circule à travers moi, je ne fais que traduire, retranscrire… » dit l’artiste qui s’en émerveille. Qu’est-ce que c’est ? De la sculpture, de la peinture, une installation, un projet parvenu à son terme ou un temps dans un cheminement qui invente ses images et son tempo ? « C’est un conte, je crois » dit l’artiste.